Tablatures







Forums de Reggae Tabs

#1  03-10-2005 16:11:55

Aragorn
 

LePouvoir:Faut-IlObéirOuRésister?Suite2

Le pouvoir : Faut-il obéir ou résister ? - 13 -

vendredi 19 août 2005, Jean Dornac



Petit rappel des articles précédents :

Postulat : Les pouvoirs se comportent comme des parents abusifs, empêchant les peuples d’atteindre l’âge adulte. (article 1). Si les pouvoirs ne sont pas légitimes au regard du « droit moral » (article 2 & 3). L’exercice du pouvoir actuel, en France et dans quelques autres pays (article 4). La résistance est légitime pour retrouver notre « souveraineté » perdue. (article 5). Résistance : Non-violence ou violence ? (article 6). Colonialisme et mondialisation financière et marchande (article 7). Le nationalisme et ses dérives sont des pièges grossiers (article 8). L’argent : ce n’est pas une valeur, juste un outil à placer tout en bas. (article 9). La régression humaine est inscrite dans l’esprit de consommation (article 10). Toutes sortes d’outils sont utilisés pour assurer notre dépendance envers les pouvoirs (article 11). Lutter contre les lois injustes est une nécessité (article 12).

La violence des pouvoirs.

Nous avons l’habitude, au travers des discours des gens de pouvoir, particulièrement avec les discours démagogiques d’un Nicolas Sarkozy, d’imaginer que la violence est le fait des milieux populaires, plus particulièrement de la frange pauvre de cette population. La Justice, en condamnant de plus en plus de miséreux, laisse penser qu’il en est ainsi. Mais c’est oublier qu’une large par de cette « Justice » est « aux ordres » et qu’elle applique scrupuleusement les lois décidées et votées par les pouvoirs, paraît-il au nom du peuple. Qui donc, ici, parmi les lecteurs, peut affirmer que le pouvoir ne lui ait jamais demandé, par référendum ou un autre moyen, s’il était en accord avec de telles lois ? Les pouvoirs actuels se basent sur les sondages, mais nous savons que ces derniers n’ont pas la moindre valeur sérieuse à partir du moment où les réponses varieront en fonction de la manière de poser la question.

Une observation un peu sérieuse, nous amène à constater très rapidement qu’il n’en est rien. L’essentiel de la violence est la marque des pouvoirs. En effet, si violence il y a, elle vient des pouvoirs, de pratiquement tous les pouvoirs. Certes, cette violence, hormis lors des guerres et des interventions de forces de répressions policières ou autres, est plus psychologique, s’adresse plus à notre vie quotidienne, qu’à nos corps, qu’à notre intégrité physique. Elle n’en demeure pas moins réelle.
Type de violences spécifiquement liées aux pouvoirs

Bien entendu, je ne pourrais faire la liste de toutes les violences, ce domaine est trop vaste, souvent trop diffus... La première des violences venant des pouvoirs et rien que des pouvoirs, celle-ci bien trop visible, attaquant aussi bien nos vies que notre santé tant physique que psychique, est et reste la guerre. Ce ne sont pas les peuples qui font les guerres, ni qui les réclament. Dire l’inverse est un non-sens et d’une mauvaise foi absolue. Cette affirmation semble être une évidence au point que beaucoup d’entre vous devez vous demander pourquoi je la note. J’y tiens parce que si vous écoutez les discours des pouvoirs, à l’exemple de ce qu’affirment un Bush et un Blair, pour ne citer que les pouvoirs malfaisants actuels, c’est toujours au nom des peuples qu’ils font leurs guerres ! Ces guerres, au total, ne se font jamais dans l’intérêt des peuples, oui, il n’y a même pas ça !

Leurs guerres servent leur orgueil personnel hypertrophié et surtout, ils servent les intérêts de nombreuses entreprises, autrement dit, encore les intérêts de la caste comme je le montrais dans certains articles précédents. Il y a de quoi être effaré lorsqu’on découvre, nous les citoyens, des décennies après, combien d’entreprises de renom, ayant toujours largement pignon sur rue, des entreprises américaines, ont soutenu le régime abominable d’Hitler ! Coca, Ford, et pas mal d’entreprises chimiques, et tant d’autres dont les noms sont moins célèbres... Aussi, ne sommes-nous plus étonnés lorsque nous apprenons que dans l’ignoble guerre contre le peuple irakien ce sont les entreprises américaines, donc l’économie américaine, les fortunes des possédants américains, dont la famille de GW Bush elle-même qui bénéficient des retombées financières du massacre.

Mais ce sont les peuples, ceux qu’on endort à coup de nationalisme, d’hymnes nationaux et de drapeaux claquant au vent, voire de messes proclamant que « Dieu est avec nous », qui paient à tous les niveaux :
- Ce sont les fils du peuple qui se font écharper sur les champs de bataille, pas les fils des bénéficiaires. Oh combien fut frappante l’interrogation de Michael Moore (dans Fahrenheit 9/11) demandant aux élus américains pourquoi ils n’envoyaient pas leurs propres fils en Irak ; et combien furent révélatrices leurs réponses évasives et le plus souvent leur fuite...
- C’est le peuple qui paye les dépenses au travers des impôts levés. Et dans le cas de la guerre d’Irak, c’est le monde entier qui paye au travers de l’odieux déficit américain qui vit depuis si longtemps à crédit sur le dos de l’humanité entière.

Les violences des pouvoirs ne s’arrêtent pas là. Les politiques d’institution du chômage sont des violences dont de nombreuses victimes meurent, directement comme indirectement, par des maladies liées aux dépressions nerveuses et autres dérèglements psychiques induits par le chômage. La destruction du droit du travail, partout dans le monde riche, n’est-elle pas une violence qui atteint, elle aussi, la santé des victimes ? Si, bien sûr ! Ces politiques rendent tout le monde fou, du salarié aux chefs et petits chefs qui ont de plus en plus souvent comme instruction d’harceler ceux dont il faut se débarrasser quitte à ce que ces derniers se suicident. La prison, pour un oui, pour un non, dès que l’on est pauvre, n’est-elle pas une violence extrême ? Combien de prisonniers se seront encore suicidés dans leur mouroir à barreaux cette année et rien qu’en France ? Imposer, là encore, pour un oui, pour un nom, la présence d’une police omnipotente, partout, même aux endroits les plus inattendus et les plus absurdes, n’est-ce pas une violence ? Si, et des gens, des innocents, en meurent ou sont détruits psychiquement, ce qui n’est guère différent.
La violence des peuples.

Je crois que dans la majorité des cas, la violence n’est pas naturelle aux peuples. Lorsqu’ils deviennent violents, il me semble que c’est pour deux raisons majeures :
- En réponse à la violence des pouvoirs.
- Suite à un endoctrinement massif.

Beaucoup de monde, en occident, est persuadé que les Palestiniens sont des gens violents. Mais ce peuple a subi tant d’injustices, tant de pillages et de meurtres de la part de l’Etat d’Israël, qu’à l’évidence sa violence répond à la violence de l’Etat hébreu. Cela se situe au niveau de la légitime défense. Je le comprends même si pour ma part je reste attaché à la non-violence. En outre, contrairement à ce que laissent entendre les reportages incomplets ou destinés à nous manipuler, ce n’est pas tout le peuple qui est passé à la violence alors que c’est tout le peuple qui souffre et meure de la violence du pouvoir israélien.

Le cas des Allemands, des Japonnais ou des Italiens, lors de la deuxième guerre mondiale, est un peu différent, il entre dans le cas de l’endoctrinement massif. Ces trois pays ont un point commun, il me semble. Sous l’effet de l’orgueil national (la France ne fut pas épargnée par ce phénomène sous Napoléon 1er), les pouvoirs réussirent à enrôler de force leurs peuples dans les crimes contre l’humanité que sont toutes les guerres offensives. Nous ne devons jamais accepter une exception à cette règle : toute guerre offensive est un crime contre l’humanité (la défense seule étant légitime). Même le « devoir d’ingérence », partant d’une affirmation humanitaire compréhensible, s’est déjà transformé en prétexte pour envahir illégitimement des pays. Lorsque j’affirme que les pouvoirs entraînent leurs peuples de force dans leurs guerres, c’est par la propagande, les manipulations diverses, les menaces aussi, les fadaises nationalistes ou patriotiques. Par ces mensonges, les pouvoirs sont parvenus à embrigader des peuples entiers. Ce qui, au passage, prouve combien les peuples ne sont pas encore adultes.

Le jour où, concernant les guerres, les citoyens soumis aux pouvoirs qui décrètent des guerres offensives auront compris qu’ils peuvent refuser de se livrer à la barbarie sans grands risques, l’humanité aura fait un grand pas vers l’âge adulte. Un pouvoir, même pour l’exemple, ne peut pas faire massacrer tous les hommes censés participer à leurs guerres. De même, pour les pays, comme la France, qui interviennent par des armées de métier, ce serait un grand progrès si nous refusions, au niveau du peuple, par des grèves multiples et même par des sabotages matériels, que ces armées participent à de nouvelles barbaries. Certes, il faut du courage, mais ce n’est en rien utopique. Ce qui est tragique, au regard de notre responsabilité en tant que citoyens, c’est que nous ne réalisions toujours pas que nous sommes infiniment plus nombreux que les décideurs, que nous, qui sommes une masse immense de plusieurs millions d’individus, nous nous laissons corrompre par les discours et les manipulations d’une petite clique de quelques milliers ou dizaines de milliers de dirigeants et d’individus obéissants plus ou moins aveuglément...

Il faut réaliser, c’est là encore essentiel, que les peuples ne sont pas, par nature, violents. Pour l’essentiel, ils n’aspirent qu’à la paix, au bonheur de vivre. S’ils deviennent violents, en temps de guerre, c’est sous l’effet d’idéologies monstrueuses qu’on leur impose par toutes sortes de manipulations. Et si ces peuples, ou une partie d’entre eux, se révoltent contre leurs propres pouvoirs, c’est encore en réaction à la violence de ces derniers ; soit en réaction à l’exploitation, soit au manque de liberté. A cet égard, les pouvoirs actuels, dans nos pays pourtant excessivement riches, peuvent s’attendre à une explosion violente dans des délais sans doute très proches.

Les abus, les mensonges, les spoliations des droits comme des ressources notamment financières, prennent tellement d’ampleur qu’il n’est pas possible qu’une révolte n’advienne pas bientôt. Et d’ailleurs, ces pouvoirs, notamment en France, en ont totalement conscience ; ils savent que leurs politiques de destructions sociales ne peuvent qu’aboutir à l’insurrection. Ce n’est pas pour rien qu’ils instaurent les lois sécuritaires partout et toujours plus lourdes ; ce n’est pas pour rien qu’ils installent partout des moyens de surveillance toujours plus resserrés. Ils subissent, en eux-mêmes, le même syndrome qui rendit Staline quasiment fou dans les dernières années de sa vie. Sachant les crimes qu’il commettait, il ne pouvait pas croire qu’en réaction sa propre vie n’était pas menacée. La délation installée à tous les niveaux de la société soviétique n’avait pas d’autre but que la surveillance au plus près de ce peuple que Staline martyrisait.

C’est la même logique que tient un Nicolas Sarkozy lorsqu’il veut, par ses discours, par ses lois indignes, instituer la délation et la présenter désormais comme une qualité et pire, comme un devoir de bon citoyen. C’est là l’une des indications les plus certaines qu’un tel homme politique compte ne respecter personne ni rien hormis son pouvoir personnel. Ce qui est inquiétant par rapport à Sarkozy, c’est que de si nombreux Français n’aient pas compris ou acceptent ce qu’induisent les actes et discours de ce politicien. Rêvons-nous tellement, individuellement ou collectivement de subir les violences d’une dictature qui ne dit pas encore son nom ou sommes-nous passés dans le camp des peuples suffisamment endoctrinés pour prêter main foret à n’importe quel crime ? Le vote des Français, dans deux, nous donnera la réponse...

Reste la violence individuelle. Elle existe, la nier serait stupide. Elle a tant de causes... La conscience insuffisamment développée ; l’alcool ou les autres drogues ; l’orgueil souvent, qui mène inévitablement au mépris et à la haine des autres. Le machisme de trop d’hommes également. Ceux-là se mettent au ban des sociétés civilisées. Ils n’ont encore rien compris, eux qui s’imaginent puissants à cause de la force de leurs biceps... Combien de femmes ont payé le prix de la stupidité d’une telle conception du monde masculin ? Mais que fait le pouvoir face à ce fléau ? Rien, ou plutôt si : il va dans le sens des brutes en autorisant les publicités qui incitent et favorisent cette forme de dégénérescence des mâles, pas suffisamment dégrossis... Les pouvoirs, pour dominer, ont intérêt à laisser se développer certaines formes de violences, ne serait-ce que pour cacher la leur. Certes, les maîtres du pouvoir vont se répandre en magnifiques discours sur l’égalité des sexes, tout en méprisant les femmes à qui il n’accorde que des strapontins de pouvoir, et des poussières de droits...

Là encore, là toujours, il dépend essentiellement de nous, que la mentalité générale change. N’attendons rien des pouvoirs, ils n’ont rien à apporter hormis leur violence en tout domaine. C’est à nous de construire un monde sans violence, un monde où les pouvoirs deviendraient inutiles tant ils seraient rétrogrades et ridicules... Nous avons les moyens, si nous le voulons, d’une telle ambition...
Le pouvoir : Faut-il obéir ou résister ? - 14 -

samedi 20 août 2005, Jean Dornac



Petit rappel des articles précédents :

Postulat : Les pouvoirs se comportent comme des parents abusifs, empêchant les peuples d’atteindre l’âge adulte. (article 1). Si les pouvoirs ne sont pas légitimes au regard du « droit moral » (article 2 & 3). L’exercice du pouvoir actuel, en France et dans quelques autres pays (article 4). La résistance est légitime pour retrouver notre « souveraineté » perdue. (article 5). Résistance : Non-violence ou violence ? (article 6). Colonialisme et mondialisation financière et marchande (article 7). Le nationalisme et ses dérives sont des pièges grossiers (article 8). L’argent : ce n’est pas une valeur, juste un outil à placer tout en bas. (article 9). La régression humaine est inscrite dans l’esprit de consommation (article 10). Toutes sortes d’outils sont utilisés pour assurer notre dépendance envers les pouvoirs (article 11). Lutter contre les lois injustes est une nécessité (article 12). La violence est le fait des pouvoirs avant tout (article 13).

Remarque : Cet article est plutôt à considérer comme une annexe aux précédents...
Tolérance et non-violence, deux armes majeures

Je ne reparlerai pas de la non-violence dans cet article bien que la tolérance en est l’une des composantes essentielle. Il ne peut pas y avoir non-violence sans une absolue tolérance. C’est-à-dire une volonté totalement tendue vers la compréhension de l’autre, fut-il un adversaire.

La tolérance, comme la liberté, ce n’est pas n’importe quoi. Ainsi, le fameux amendement américain qui sous prétexte de tolérance autorise la vente d’armes à quiconque le veut ou qui autorise la constitution de groupes extrémistes, y compris racistes ou néonazis, c’est n’importe quoi ; on connaît les tragédies qui en découlent... On voit donc que la tolérance n’est pas une chose aisée à comprendre ni à appliquer. Je crois, du moins est-ce ma perception personnelle, qu’il doit y avoir tolérance en tout chose à partir du moment, et seulement à partir de là, où il y a volonté de servir l’humain, de faire grandir l’humanisme dans l’esprit des humains. Bref, tout ce qui va dans le sens du respect et du progrès de chacun de nous, sans exception aucune.

Bien entendu on peut comprendre l’intérêt des foules de bien des manières. Les actes désintéressés de nombre de « grands » sages de l’histoire furent des exemples positifs au service de l’intérêt général, mais il existe également, et c’est le cas le plus fréquent, des procédés égoïstes, sous couvert d’intérêt général, qui finissent tous par être criminels. Je vise là, parce que désormais c’est une évidence pour toute personne dont l’esprit n’est pas occulté par l’idéologie, le néolibéralisme. Voilà des gens, tous ceux qui prétendent nous gouverner en tout domaine, qui affirment la main sur le cœur, que leur système est le seul, l’unique parfait qui puisse éradiquer la pauvreté dans le monde. Moyennant quoi, par l’application dictatoriale de leurs principes idéologiques, ils créent une accentuation de la pauvreté partout dans le monde et, moyennant quoi ils ne s’oublient pas au passage puisque leurs fortunes ne cessent de devenir de plus en plus délirantes. C’est l’exemple type d’un discours enrobé de mille fleurs, mais, qui en pratique, est une arme monstrueuse au seul service et bénéfice des castes du profit.

La tolérance ne signifie pas forcément être en accord avec celui ou celle qui présente une idée, une pensée, un acte. Cela veut dire comprendre la personne, la respecter dans ses opinons. Nous avons une fâcheuse tendance à rejeter les autres en raison de leurs opinions, de leur foi ou de leur incroyance, parce que tout de suite nous créons dans notre imaginaire des « catégories ». Ce fut très clair après le référendum, de la part de ceux qui se nomment eux-mêmes des élites. Parce qu’une majorité d’électeurs avaient repoussé ce projet, les esprits élitistes, ne s’embarrassant d’aucun scrupule, d’aucune réflexion de fond, nous ont tous placés dans les catégories de « fascistes », de « gauchistes » ou encore d’ignorants. Chercher à nous comprendre, non, ce n’est pas de leur niveau, ni dans leurs intérêts, fâchés qu’ils étaient qu’une large part du peuple barrait la route à leurs ambitions, à leur supériorité et, comment ne pas le dire, à leurs intérêts personnels. Si ces derniers n’avaient pas été en cause, leurs réactions n’eurent pas pris des allures d’insultes, de mépris et même de haine.
La nécessaire tolérance entre militants

Si la suite de ce texte vous paraît provocante, je vous demande de me le pardonner parce que mon intention n’est pas là. Mon seul désir, que l’on me croit ou non, est de poser des jalons pour que nous puissions réfléchir autrement, ouvrir notre esprit, larguer les a priori qui nous encombrent tous, moi y compris.

Le risque de la provocation réside dans le choix que je vais faire pour la suite de l’analyse. Je répète, avant de commencer qu’il faut bien s’être imprégné des lignes précédentes pour comprendre ma démarche. Si je me lance dans ce qui représente un risque non négligeable pour la suite de mon combat, au niveau de la crédibilité, c’est parce que je ressens ce que je vais écrire comme fondamental. Je me suis rendu compte, et cela ne date pas d’aujourd’hui, qu’en dépit de toute l’ouverture d’esprit dont sont capables les militants de gauche, de toute la gauche non vendue aux intérêts des néolibéraux, ils restent dans certains domaines et un en particulier, très, voire excessivement, intolérants.

Le sujet dont je veux vous entretenir, pour alimenter notre réflexion commune, concerne la compréhension des humains affirmant leur spiritualité. Mais avant d’entrer dans cette analyse de notre propre intolérance, je veux réaffirmer avec force une chose : Je ne fais pas la promotion des religions instituées, pas plus que des sectes. Si vous prenez le parti pris de ne pas me croire dans cette affirmation, vous ne pourrez pas comprendre ce que je veux montrer. Et dans ce cas, à vos yeux, c’est tout mon combat, tout mon travail qui n’aura plus la moindre crédibilité. J’en prends le risque parce que je crois que dans ce point précis réside déjà un grave danger pour cet autre monde possible que nous voulons construire.

Autre précision importante, je ne fais pas non plus la promotion de la spiritualité. Celle-ci est affaire personnelle de ressenti, de compréhension des phénomènes de la vie. Il me semble en revanche naturel que nous tentions de comprendre pourquoi nous vivons... Cette interrogation comporte déjà en elle-même une dimension, en tout cas une approche spirituelle.
Une autre pensée, libre comme le vent fou qui va partout

Voilà l’ambition à laquelle je m’attache depuis pas mal de temps. Pour y parvenir, il est nécessaire, obligatoire même, de se défaire de la plus large part culturelle reçue et enfouie au plus profond de notre cerveau. Tout n’est pas mauvais dans la culture ingurgitée depuis la prime enfance, mais comment s’ouvrir à des choses neuves si cette culture affirme en nous être la seule vérité, la vérité absolue ? Pour devenir adulte, un humain comme une société, doit, sans cesse, même si c’est épuisant, et ça l’est, se remettre en cause, chasser les certitudes trop bien établies. Ce type de certitude nous fige dans la mort de l’esprit bien avant la mort du corps. Nous devenons, si nous laissons ce poison nous étouffer de vieux fossiles blanchis... Et de plus, nous empoisonnons notre entourage. Tous les extrémismes sont faits de certitudes définitives alors même que la vie est depuis toujours et pour toujours, mouvement, adaptation et recherche de nouveaux chemins.

Au feu donc, les a priori idéologiques, mais aussi les certitudes religieuses qui bâtissent les intégrismes meurtriers. Je m’avance en disant cela, mais je crois qu’il ne peut pas y avoir de spiritualité vivante qui ne soit basée que sur des certitudes enseignées. Voilà sans doute pourquoi, parlant des assemblées religieuses du dimanche, le curieux qui débarque pendant une messe a la pénible impression de découvrir des communautés mortes, du milieu desquelles ne surgit ni joie ni spontanéité. Sans vouloir juger les pratiquants d’une religion, ici les chrétiens, il faut bien reconnaître que, majoritairement, ils ne peuvent pas communiquer l’envie de croire au travers de leur attitude pendant une messe et, pour certains d’entre eux, encore moins par leurs actions hors de la messe dominicale.

Mais comment ne pas comprendre que tout cela n’a rien à voir, ou si peu, avec la spiritualité dont je parle ? La spiritualité bien comprise doit mener à quoi ? (ce n’est que mon opinion et, je répète que je ne détiens aucune vérité) :
- Elle doit mener à la libération totale de l’être. Et cela veut dire que l’être qui se laisse toucher par cette spiritualité, si elle est vraie, si elle est sincère, ira de simplification en simplification. De plus en plus, il s’éloignera de la vie matérielle pour toujours approfondir le relationnel avec tous ceux qu’il rencontrera sur son chemin. Le vrai spirituel ne cherchera jamais le pouvoir, ce serait un contresens total ; il ne cherchera pas la fortune, elle ne lui servirait à rien. En fait, il calmera, et peut-être, fera taire en lui l’essentiel des désirs, mais jamais le désir de la vie, jamais le désir d’apprendre à aimer. Simplement, tout se recentrera sur ce dernier point à mesure qu’il progressera.

J’arrête là pour les explications sur la spiritualité, sinon vous penseriez que je m’embarque dans un sermon religieux...

Mais il faut reconnaître une chose, si l’on est capable de s’écarter des méfaits dont se sont rendues coupables la majorité des religions instituées, c’est que dans toutes ces spiritualités qui ont donné naissance, par la suite, à des religions, il y a des pensées, des écrits tout simplement superbes et d’une profondeur rarement atteinte par les autres formes de pensées. C’est vrai du christianisme, c’est vrai du judaïsme, de l’Islam, du bouddhisme, de l’indouisme et de toutes les grandes spiritualités.
Pourquoi ce rejet quasi allergique ?

Ce que je voudrais faire comprendre sans savoir si j’ai la moindre chance de convaincre quiconque, c’est que la vraie liberté de l’esprit n’est pas d’exclure ceci ou cela, mais de l’écouter, méditer, pour en garder ce qui est bon et en rejeter, dans le respect, ce que nous n’apprécions pas, sachant que peut-être nous ne l’avons pas non plus compris... Pourquoi, sous quel prétexte idéologique, devrions-nous obligatoirement nous passer de choses magnifiques, pouvant réellement faire progresser toute l’humanité ? Ce n’est pas parce que Marx à dit que la religion était l’opium du peuple que toutes les spiritualités sont à jeter dans la vaste poubelle de l’histoire. Ce n’est pas parce que Sarkozy trouve qu’il y a du bon dans les religions qu’il faut jeter, par opposition systématique et non réfléchie, les spiritualités et leurs plus beaux messages au feu.

Ce dont on ne se rend pas assez compte, c’est qu’une spiritualité vraie est, par essence, contraire à toute idée de pouvoir. Marx avait raison en son temps, et il aurait encore le plus souvent raison aujourd’hui si son affirmation concerne les religions instituées. Sarkozy, quant à lui, comment penser autrement, obnubilé par l’exemple de « maître Bush » rêve uniquement d’assurer son pouvoir futur par l’obéissance religieuse obtenue au travers des religions à l’esprit possessif. Ce que n’ont pas compris ces deux personnages, et ce que comprennent fort peu de gens au sein des sociétés, c’est qu’une vraie spiritualité n’a rien à faire des pouvoirs. Comme pour le matérialisme, la spiritualité rit du pouvoir parce qu’il n’est que dérisoire.

La crainte des gens, face à la spiritualité, c’est de se faire, une fois de plus, enrôler dans une religion. Ceci, je le comprends. Mais il ne tient qu’à eux de rester libres. Ce qui n’est pas acceptable, à mon sens, c’est la volonté de « convertir » les autres de la façon dont la plupart des religions l’ont pratiqué. Il y a déni de liberté de conscience et ceci n’est pas acceptable. Si conversion il doit y avoir, elle ne peut venir que du plus profond de nous-même pour avoir un sens. Le reste, c’est du carnaval et de fort mauvais goût. Les conversions forcées, comme l’histoire en a vu tant d’exemples, sont le fruit de manipulations, de mensonges, de menaces de toutes natures, donc d’irrespect total de la nature intrinsèquement libre de l’humain. Autrement dit, il serait totalement inacceptable que nous assistions à un retour du pouvoir religieux. En soi, c’est un non-sens et là, nous avons raison de lutter, là, nous devons lutter, nous devons nous dresser contre cette dictature exercée sur l’âme et la conscience des humains.

Mais il ne faut pas « jeter le bébé avec l’eau souillée ». Rejeter un militant parce qu’il fait part de ses recherches spirituelles, parce qu’il a une affirmation spirituelle, est le meilleur chemin pour échouer dans la construction d’un nouveau monde possible. C’est poursuivre les errements de l’intolérance de toujours. A quoi bon affirmer haut et fort qu’on veut un nouveau monde si c’est pour poursuivre les pratiques d’exclusion de toujours ? Il n’y aura rien de neuf, dans ce cas ; les pouvoirs pourront poursuivre leurs œuvres de destructions, les puissants continueront de profiter de nous tous. En fait, l’essence du pouvoir ne changera pas, ce seront uniquement les occupants de ce pouvoir qui changeront. Il faut comprendre que vouloir un nouveau monde possible implique, obligatoirement, une nouvelle pensée, plus large, plus tolérante où nous acceptions tout ce qui peut grandir l’homme, tout ce qui peut l’amener enfin à l’âge adulte.

Alors, en ce qui me concerne, oui, il m’arrive de lire les évangiles ; oui, il m’arrive, plus rarement parce que je n’en ai pas la connaissance suffisante, de lire des versets du Coran, des passages des livres indous, ici ou là, des phrases venant du bouddhisme, tout en lisant aussi Marx et tant d’autres. Tous ceux-là sont-ils intrinsèquement mauvais parce que leurs successeurs ont déformé leur pensée, prenant le pouvoir là où il ne devait y avoir que le service ? Non, je refuse de faire un tri idéologique. Je prends ce qui me semble bon et laisse de côté ce qui me semble plus discutable. Et, je fais tout, pour n’exclure personne. Si je le faisais, je devrais immédiatement cesser mon travail sur altermonde, car ma volonté de lutter pour un autre monde possible ne serait qu’un vaste mensonge...

C’est le chemin de la pensée que je vous propose, non pas comme une vérité, mais comme un moyen de progrès humain, une démarche d’honnêteté, sans a priori, sans exclure, sans rejeter d’office celui qui est différent sous le prétexte qu’il ne fait pas partie de notre école de pensée. Ne rêvons à un autre monde possible que si nous avons la volonté de changer nous-mêmes et en premier en faisant tout pour écouter et comprendre les autres, même lorsqu’ils sont nos adversaires. Une partie du chemin vers le combat non-violent sera ainsi déjà parcouru...

Hors ligne

#2  03-10-2005 16:17:51

Aragorn
 

Re: LePouvoir:Faut-IlObéirOuRésister?Suite2

Le pouvoir : Faut-il obéir ou résister ? - 15 -

dimanche 21 août 2005, Jean Dornac



Petit rappel des articles précédents :

Postulat : Les pouvoirs se comportent comme des parents abusifs, empêchant les peuples d’atteindre l’âge adulte. (art 1). Si les pouvoirs ne sont pas légitimes au regard du « droit moral » (art 2 & 3). L’exercice du pouvoir actuel, en France et dans quelques autres pays (art 4). La résistance est légitime pour retrouver notre « souveraineté » perdue. (art 5). Résistance : Non-violence ou violence ? (art 6). Colonialisme et mondialisation financière et marchande (art 7). Le nationalisme et ses dérives sont des pièges grossiers (art 8). L’argent : ce n’est pas une valeur, juste un outil à placer tout en bas. (art 9). La régression humaine est inscrite dans l’esprit de consommation (art 10). Toutes sortes d’outils sont utilisés pour assurer notre dépendance envers les pouvoirs (art 11). Lutter contre les lois injustes est une nécessité (art 12). La violence est le fait des pouvoirs avant tout (art 13). La nécessité de la tolérance pour accéder vers d’autres mondes possibles (art 14).

Vouloir une « révolution de la pensée »

Si vous acceptez l’essentiel de la teneur de cette analyse, vous comprendrez où je voulais en venir. Aujourd’hui, en l’an 2005, en ce début du troisième millénaire, lorsqu’on regarde l’humanité se débattre dans ses souffrances, on comprend que si les techniques ont considérablement évolué, la mentalité humaine, et en tout état de cause dans le domaine relationnel, est restée collée au mental des origines. Le plus curieux dans cette constatation, c’est de réaliser que les plus rétrogrades dans cette stagnation de l’esprit, n’est pas le fait des pauvres ou des miséreux, même s’il y a aussi dans ce monde-là des gens qui n’ont pas progressé. Non, l’essentiel des humains rivés aux mentalités des origines, ce sont les « propriétaires » du pouvoir, de tous les pouvoirs, c’est tout ce monde, prodigieusement ridicule, tout en étant tragiquement monstrueux, qui se désigne par le nom « d’élite ».

La responsabilité des pauvres, des miséreux, des petits ou des modestes dans cette stagnation ne pèse rien à côté de celle des puissants. Ce monde féroce des puissants dispose de tout : du pouvoir, du savoir, du moins d’un certain savoir, de la fortune, donc, ce monde dispose de tous les outils pour progresser lui-même et faire progresser les peuples dont il s’est donné la charge. Ce sera toujours la responsabilité de celui qui reçoit le plus de donner le plus. La culpabilité de la quasi-totalité des pouvoirs, y compris des pouvoirs religieux, depuis les origines, est puissamment engagée dans cette stagnation de l’esprit humain par le refus, même pas de donner mais simplement de partager.

Nous pouvons comprendre, au travers du postulat rapprochant la dérive psychologique des parents possessifs et l’identique dérive des pouvoirs possessifs, la raison profonde de la stagnation humaine. Il n’est en rien dans l’intérêt des pouvoirs d’accepter l’émancipation des peuples. Cette émancipation signifierait, irréversiblement, la fin des pouvoirs, la fin de l’utilité de la notion de pouvoir.

Nous pouvons de ce fait entrevoir l’immensité du chemin à parcourir pour nous libérer de ce « pouvoir père abusif ». La condition de la libération est de renoncer à la dépendance face à n’importe quel pouvoir. Je répète que, sans doute, les pouvoirs avaient dans le passé une justification. Mais ils ont globalement failli à ce qui aurait dû leur apparaître comme leur devoir : l’émancipation des peuples.

La seule justification de l’autorité d’un père ou d’une mère, quelle que soit la forme de l’union, libre, marié, parent isolé, etc, lorsqu’on comprend réellement ce rôle majeur, est de conduire l’enfant à son autonomie et son émancipation. La seule preuve de la réussite des parents à l’égard de l’éducation qu’ils ont donnée ainsi que du vrai sens de leur amour pour les enfants est la réalité de l’émancipation de ces derniers. Le départ d’un enfant, lorsqu’il est autonome, devrait se fêter puisqu’un nouvel adulte est né au monde. Seul un adulte pourra, à son tour, apporter tout son potentiel à l’humanité ; si petit que soit son apport, jamais il ne sera inutile.

J’en suis profondément convaincu, il en va de même pour le sens du pouvoir. Sur ce plan, l’échec est considérable et dure depuis des millénaires...
Où donc se niche la véritable responsabilité ?

Les détenteurs du pouvoir sont-ils pour autant totalement responsables de leurs actes, ces actes qui nous empêchent d’atteindre l’âge adulte des peuples ? Il n’y a sans doute pas de réponse absolue. La vie, la construction de chaque être, est d’une complexité extraordinaire. Et cela est vrai pour tout être humain venant au monde, quel que soit son milieu. Le poids historique, le poids culturel, l’éducation reçue, l’époque de la naissance, ce que les gènes nous ont ou non transmis, tout cela et tant d’autres éléments encore vont influer sur l’être appelé à grandir. En ce sens, si je suis lucide et radicalement honnête, je ne peux pas juger une personne, qu’elle soit détentrice ou non d’un pouvoir. Et en ce sens, également, de quel droit exercerais-je une quelconque violence contre elle ? De quoi est-elle réellement responsable dont elle serait comptable devant moi ? Qui suis-je pour oser juger un seul être humain ? C’est l’une des questions essentielles que nous devons tous nous poser si, du moins, nous voulons devenir adultes par notre pensée.

Cette extraordinaire complexité de l’être humain, nous impose l’une des plus puissantes justifications de l’action non-violente. Comprenant cela, je ne peux m’autoriser la moindre haine envers qui que ce soit. Et ce n’est pas faire preuve d’une exceptionnelle bonté, non, c’est juste la conclusion d’une lucidité qui se veut la plus complète et la plus juste possible. Quitte à faire hurler bien du monde, je considère, personnellement, que les bourreaux sont autant victimes que les êtres qu’ils écrasent. Ils sont victimes de toute cette chaîne de faits ou d’événements que j’ai cités plus haut. Alors, au plus proche de la vérité, quelle est leur véritable responsabilité ? Je défie n’importe qui sur cette terre de m’apporter la preuve radicale d’une responsabilité absolue d’un seul humain dans ses actes. Mais attention, cela ne signifie pas non plus, hormis quelques cas exceptionnels relevant de la maladie mentale, qu’il existe une irresponsabilité absolue. Tout est dans ce domaine, comme dans tant d’autres, affaire de nuances et de circonstances...

Pour autant, si ce raisonnement montre à quel point les responsabilités sont diluées dans le temps et dans la chaîne humaine depuis les origines, nous n’avons pas le droit de nous laisser écraser. C’est le devoir de ceux qui ont bénéficié d’une compréhension plus large du sens de la justice, du respect et de l’amour des autres, de se lever, de s’opposer aux pouvoirs, donc à leurs détenteurs. Mais, et je voudrais le crier à la face du monde : Luttons contre les idées, contre les perversions de l’esprit humain, mais pas contre les hommes !

Si je suis adulte, dans le sens le plus profond du terme, je ne peux pas me livrer à la violence, sauf si l’adversaire que j’ai face à moi abandonne toute part d’humanité développée et agit en barbare absolu. Dans ce cas, si nous avons le devoir de nous défendre, de défendre tout le monde, et pas seulement ceux que nous aimons, tentons au moins de le faire sans haine et pas plus que nécessaire. Je ne peux pas oublier les images infâmes de ces actes abominables de vengeance après la dernière guerre, lorsque certains rasaient des femmes coupables d’avoir aimé des hommes de l’autre camp... C’était inutile et monstrueux, indigne de tout esprit civilisé...

De même que la libération d’un enfant dominé par un parent possessif ne peut pas venir de ce parent lui-même, mais uniquement par la prise de conscience de l’enfant lui-même, de même il en sera pour les peuples. Nous ne pouvons ni attendre ni espérer que les pouvoirs se réforment d’eux-mêmes. Ce serait une utopie fatale. Le véritable changement viendra des peuples et uniquement d’eux. S’ils veulent bien prendre conscience qu’ils sont littéralement « possédés », et ne peuvent de ce fait s’envoler vers leur âge adulte, alors tout devient possible.

Le fils ou la fille écrasé sous la domination d’un parent abusif ne parviendra à gagner son émancipation, et encore dans la souffrance psychique, que par une profonde révolution de sa pensée. Cet enfant ou adolescent devra tout remettre en cause, absolument tout. Sans ce travail épuisant, douloureux, il n’évoluera pas et ne connaîtra jamais la réalité mentale de l’âge le plus beau, celui de l’adulte alors même que son corps vieillira et que son esprit s’asséchera.

Il est impératif que nous comprenions que, soumis au même schéma, nous devons suivre le même chemin pour nous libérer, ou renoncer et mourir en tant qu’humanité.
La libération viendra de nous-même ou ne sera jamais...

Un parent abusif peut être extrêmement intelligent, ce n’est pas incompatible. Mais cette intelligence se mettra, pour l’essentiel, au service de l’écrasement de son rejeton dans l’espérance de ne pas le perdre en tant que « possession ». Ce qui, rapporté aux « élites », signifie que je reconnais tout à fait, pour nombre d’entre elles, une remarquable intelligence que je qualifierais « d’intellectuelle ». Mais cette intelligence n’existe et n’agit qu’au détriment de la conscience des « élites ». Ils l’utilisent pour eux-mêmes au lieu, au travers d’une intelligence du cœur qui semble manquer totalement, d’user de ce don pour accélérer l’émancipation de leurs concitoyens. Et là, nous retrouvons la cause majeure du malheur humain, l’orgueil en action, l’orgueil qui ravage tout et qui rend totalement stérile tout intelligence si belle et grande fut-elle...
Que valent nos analyses sur les idéologies ?

Dans le combat militant, nous avons trop souvent l’habitude de réagir, face à nos adversaires avec nos outils idéologiques. Nombre d’analystes décortiquent le capitalisme ou la droite, d’autres, à l’inverse décortiquent le communisme ou la gauche. Rapidement, eux tout comme nous-mêmes, nous classons les individus en « catégories » à combattre, autrement dit en « ennemis » et non plus en adversaires. Dès que nous créons des catégories dans lesquelles nous enfermons nos opposants, nous nous mentons à nous-mêmes parce que nous nions l’autre en tant que personne égale en dignité et en importance. La haine pourra se développer au travers de toute la puissance ravageuse dont elle est capable et ce d’autant plus qu’elle sera attisée par la certitude que nous avons raison, que nous avons seuls raison, cette haine sera attisée par conséquent par notre propre orgueil. Là, sans nous en rendre compte, nous servons les pouvoirs parce que nous empruntons la même logique que la leur, celle qui les anime depuis toujours. Tout adversaire qui imite leurs agissements pérennise leur puissance en légitimant leur existence. Ils ne verront (et serait-ce faux ?) que des concurrents et non pas des humains en quête de leur autonomie...

Autrement dit, les tenants du pouvoir ne craignent pas ce qui leur ressemble parce que le combat se passe sur leur propre terrain mental, mais ils ne supportent pas ce qui est trop différent, donc insaisissable, en particulier le combat non-violent car là, ils doivent se battre en terrain inconnu.

Mon propos n’est pas de dire que l’analyse, même poussée, des idéologies adverses est inutile, tout au contraire, c’est nécessaire. Mais, il me semble que, le plus souvent, les analystes s’arrêtent à l’idéologie oubliant, ensuite, d’aller en amont, oubliant de considérer quel est le fondement même qui a créé l’idéologie combattue. Si au travers de ces analyses, on ne prend pas en considération toute la part de la nature humaine, on comprendra bien sûr les torts majeurs de l’adversaire, mais on oubliera de les comparer à nos propres actes ou pensées qui, peut-être bien, vont déjà dans le même sens.

Il faut que nous ayons, sans cesse, à l’esprit que ce ne sont pas les idéologies qui forment les hommes, mais bien les hommes qui font les idéologies. Si une idéologie est meurtrière, c’est parce que les hommes qui l’ont conçue et qui l’appliquent ont une mentalité meurtrière. C’est donc bien plus l’homme dont il faut changer la mentalité plutôt que de se contenter de changer l’idéologie.

En raccourci simple, pour le néolibéralisme, cela donne quoi :
- Le monde des élites qui veut profiter de tout : C’est la faiblesse de la nature humaine et cela s’appelle la cupidité, le vol, l’envie...
- Ce même monde ne supporte ni le partage du pouvoir, ni le partage de la pensée : C’est encore la faiblesse humaine qui porte pour nom, l’orgueil, la jalousie...
- Ce même monde, parce qu’il a peur, usera des forces qu’il a créées : C’est toujours la faiblesse humaine, et cette fois cela porte le nom de violence, de haine, de mépris...

Pour nécessaires que soient les analyses les plus fines à propos des idéologies, si nous ne comprenons pas quelles sont leurs assises au plus profond de l’être humain, nous ne progresserons pas. La non-violence devient force dès lors qu’elle comprend qu’à la base de toutes les oppressions, on ne trouve pas des idéologies, qui ne sont en fin de compte que des « vêtements d’apparat », mais bel et bien la faiblesse de toujours des hommes, de certains hommes.

Pour simplifier à l’extrême, je vous donnerai un exemple évident :
- Si un patron veut faire un maximum de bénéfice, un peu pour son entreprise, beaucoup pour sa propre fortune et son propre pouvoir, ce n’est pas parce qu’il est néolibéral ; c’est parce qu’il est cupide et orgueilleux... Le « marché », la « rentabilité », la « compétition » et tous les autres mots en usage dans ces milieux ne sont que les différentes pièces du vêtement permettant de donner une apparence de légitimité à des défauts qui viennent de la nuit des temps.
Une pensée radicalement différente.

Notre pensée doit, je le crois profondément, suivre un chemin ascendant du type suivant :
- Si nous voulons et devons combattre les idéologies monstrueuses, et non pas les hommes, il faut que nous comprenions pourquoi tel ou tel est devenu un monstre. Il nous faudra comprendre quel chemin l’a conduit à une telle dérive.
- Ce ne sera pas suffisant parce qu’au-delà, c’est l’homme en tant qu’espèce, en tant que psychologie aussi bien individuelle que sous forme de société, qu’il nous faut comprendre. C’est jusqu’à ce niveau qu’il nous faut remonter. Si nous voulons nous approcher un peu au moins de la vérité, il faut remonter aux origines humaines, dont nos gènes ont gardé des traces plus ou moins importantes selon les individus.

Il ne sert donc à rien de décortiquer telle ou telle idéologie si l’on ne cherche pas avant tout à comprendre ce qui anime ou déforme les humains qui la portent. Si nous restons uniquement au stade de la compréhension des mécanismes d’une idéologie que nous voulons combattre, sans aller jusqu’au fond de la nature humaine, nous travaillons pour rien. Tout peut recommencer sous une autre forme et le plus souvent elle est pire que dans sa première version. L’ingéniosité humaine est telle qu’il se trouvera toujours des tyrans, mais aussi des philosophes égarés pour inventer de nouvelles formes de domination des autres. C’est ce à quoi nous assistons avec le néo ou l’ultralibéralisme. Tous deux sont issus du vieux capitalisme. Ce dernier a été mille fois décortiqué par Marx, Hengel, Rosa Luxembourg et tant d’autres. Il ne me semble pas, pour autant, que la nature profonde qui anime le capitalisme ait été étudiée et mise en cause (mais je peux me tromper). Et nous assistons aujourd’hui au retour de cette bête hideuse autrement redoutable que dans le passé, c’est parce que nous n’avons pas voulu voir ou savoir, qu’à la base, c’est la nature humaine qui invente des horreurs.

Ceci signifie une chose : Bien plus que de réformer ou jeter les idéologies, qui restent changeantes aux cours des âges de l’humanité, il s’agit de changer l’homme ; il s’agit de lui donner les moyens d’aller vers l’âge adulte, ni plus ni moins. Parce qu’il faut agir à ce niveau-là et surtout pas en aval, le combat sera extrêmement long. De plus, si nous voulons vraiment qu’il soit efficace, que le changement soit volontaire et non pas imposé par une nouvelle dictature du pouvoir religieux ou un autre, cette fois, et sérieusement, nous devons commencer par nous-mêmes. Si nous ne l’acceptons pas, comment espérerions-nous comprendre la difficulté de cette tâche ; comment pourrions-nous espérer comprendre la non-violence qui est d’abord une victoire à acquérir sur nous-mêmes ?

Ne recommençons pas l’erreur sans cesse répétée d’attendre le premier effort de la part de ceux que nous considérons comme nos adversaires ! Ils n’auront pas la moindre raison de nous imiter, pas même de réfléchir, si nous sommes incapables de leur montrer à quoi peut mener une vie d’adultes véritables. On n’imite pas ce qui nous est semblable. Mais on peut être tentés d’imiter ce qui est différent de nous si nous percevons un possible ou un probable progrès. Il faut passer par le constat de nos propres faiblesses pour savoir ce qu’est l’homme, et de ce fait pour réaliser que la haine de celui qui est différent n’a aucune assise sérieuse. En face, l’adversaire, vit le même drame de la faiblesse humaine. A nous de lui montrer que cette faiblesse peut être transformée en force, mais tout en douceur, sans la moindre violence.

Si nous avons sérieusement la prétention de nous battre pour un autre monde possible, sous-entendu forcément plus juste et beau que le précédent, c’est ce chemin que nous devons suivre. Sans ce travail sur soi, cette tentative de nous éclairer nous-même par la compréhension de soi et des autres, sans cette écoute attentive de la conscience, nous ne déboucherons, nous aussi, que sur de nouvelles haines et de nouvelles violences.

Le pouvoir : Faut-il obéir ou résister ? - Fin -

lundi 22 août 2005, Jean Dornac



Petit rappel des articles précédents :

Postulat : Les pouvoirs se comportent comme des parents abusifs, empêchant les peuples d’atteindre l’âge adulte. (art 1). Si les pouvoirs ne sont pas légitimes au regard du « droit moral » (art 2 & 3). L’exercice du pouvoir actuel, en France et dans quelques autres pays (art 4). La résistance est légitime pour retrouver notre « souveraineté » perdue. (art 5). Résistance : Non-violence ou violence ? (art 6). Colonialisme et mondialisation financière et marchande (art 7). Le nationalisme et ses dérives sont des pièges grossiers (art 8). L’argent : ce n’est pas une valeur, juste un outil à placer tout en bas. (art 9). La régression humaine est inscrite dans l’esprit de consommation (art 10). Toutes sortes d’outils sont utilisés pour assurer notre dépendance envers les pouvoirs (art 11). Lutter contre les lois injustes est une nécessité (art 12). La violence est le fait des pouvoirs avant tout (art 13). La nécessité de la tolérance pour accéder vers d’autres mondes possibles (art 14). Il nous faut aller vers une révolution de la pensée personnelle et collective (article 15).

Quitter les rives du passé...

Changer la pensée :
Je voudrais, tout d’abord, au moment de clore cette longue analyse, rappeler que je n’ai nulle prétention à me présenter comme un philosophe ou comme un penseur. Non, je ne suis qu’un homme parmi les autres. Mon seul objectif est de vous inviter, chacun à votre manière, selon votre culture, à changer votre pensée, à la faire évoluer en renversant les frontières des habitudes et du confort. Il faut tenter, toujours, si l’on veut avoir une façon de penser qui aille plus loin que les faits, que les apparences transmises par ces faits ou par les discours, de chercher le sens, de comprendre pourquoi les êtres agissent de telle ou telle manière.

S’écarter de l’avoir qui fait la cupidité :
Pour que notre pensée soi effectivement tout autre, il faut chasser les réflexes de peur, de soumission aux pouvoirs, de haine et de violence. Rien d’important, aucun progrès, pour nous et l’humanité dans sa totalité, ne peut se faire sous l’emprise de ces réflexes, tous liés à nos origines dans la nuit des temps. Tant que nous demeurons dans le domaine des réflexes liés à notre animalité, nous attacherons de l’importance à l’avoir, au désir d’avoir, au désir de posséder les objets autant que les humains, pas plus considérés comme des objets. Nous continuons, en fait, à vivre à l’âge du nourrisson de l’humanité. Nous restons, dans ce cas, dans une impasse qui, aujourd’hui, s’aggrave au travers de l’esprit de consommation, et cette impasse, je n’en doute pas, est mortelle dans un délai désormais très bref...

Abandonner les conformismes :
Il nous faut quitter les conformismes. Que veulent dire, lorsqu’on y songe sérieusement, les normes établies au fil des siècles, dès lors qu’on réalise qu’elles ont été, pour l’essentiel, imaginées et voulues par les pouvoirs successifs ? Le respect des normes n’est pas synonyme de respect des humains ou de la vie ; c’est uniquement l’obéissance aveugle à des lois décidées par d’autres pour la survie de leur pouvoir. Ouvrez votre esprit et comprenez, par exemple, que la « mode » est une norme imposée par des entreprises pour l’unique intérêt de ces entreprises. Comprenez que si vous ne suivez pas la mode et qu’on vous traite de « ringard », c’est un chantage stupide sur votre manque de réflexion profonde. Un esprit adulte n’a que faire de ces enfantillages...

Changez de valeur, classez-les autrement :
Je l’ai dit précédemment, mais je le répète car c’est majeur, la « valeur » argent, rejetez-là aux derniers rangs des nécessités. Mais remontez au tout premier rang, la valeur humaine, la relation avec vos proches, mais aussi avec tout être que vous avez la chance de rencontrer. Comprenez que l’argent n’est rien qu’une utilité alors que l’être humain est tout ce qui compte, tout ce qui doit polariser votre attention. Ainsi, remettez de l’ordre dans vos priorités, du moins par rapport aux priorités que les pouvoirs cherchent à vous inculquer. Voyez avec ce raisonnement comme l’obsession de la croissance, si présente dans les discours de nos gouvernants, devient pratiquement ridicule à côté de la valeur humaine. Si vous comprenez cela, au plus profond de votre être, c’est tout le système économique actuel que vous rejetterez. Vous comprendrez dans toute sa profondeur, l’affirmation suivante : « Ce n’est pas l’homme qui est au service de l’économie, mais l’économie qui doit être au service de l’homme ». Et vous comprendrez à quel point le système qui oppresse aujourd’hui le monde est pervers. Vous comprendrez également l’une des méthodes essentielles de l’idéologie, pratiquée par tous les pouvoirs politiques et économiques : l’inversion systématique de toutes les valeurs humaines ; la vérité devient mensonge et le mensonge est présenté comme la vérité.
Pourquoi est-il urgent de résister ?

Pourquoi ? C’est d’une simplicité quasi enfantine : Le monde est malade des pouvoirs ! Il est, nous sommes tous, comme l’enfant sous la pression d’un parent possessif, malade et ignorant de ce qu’est la liberté, ne comprenant même pas pourquoi nous sommes captifs...

Au point où en est arrivée ma réflexion personnelle, je ne trouve plus rien de bon à aucun pouvoir, même si certains de ces pouvoirs resteront encore nécessaires en attendant notre émancipation.
Notre monde, notre humanité est malade des pouvoirs politiques !
Notre monde, notre humanité est malade des pouvoirs économiques !
Notre monde, notre humanité est malade des pouvoirs médiatiques !
Notre monde, notre humanité est malade des pouvoirs scientifiques !
Notre monde, notre humanité est malade des pouvoirs culturels !
Notre monde, notre humanité est malade des pouvoirs religieux !

Et nous sommes atteints jusque dans nos familles, jusque dans nos couples où, trop souvent, l’un ou l’autre, voire les deux, cherchent le pouvoir ! Quel domaine est libre des pouvoirs ? Au bilan, nous sommes malades de ne pas avoir su ou pu nous libérer de nos instincts primaires, qui, j’en suis convaincu, commandent encore toujours notre être. Vous avez parfaitement le droit de penser que je suis excessif, mais analysez-vous, regardez votre vie personnelle, familiale, professionnelle ; observez la façon d’agir des autres pouvoirs...
Que faire ?

Je ne possède pas plus la clef de cette solution que la vérité. Mais je crois tout de même que la priorité est de changer notre pensée, de la libérer comme je l’ai dit au début de cet article. Ainsi, nous pensons, généralement qu’il n’est pas possible de se passer des pouvoirs. Forcément, nous sommes placés depuis toujours dans une logique de dépendance. Mais pourquoi, pourquoi donc, l’esprit humain, si ingénieux pour concevoir les pires formes du pouvoir, ne pourrait-il pas enfin, au début de troisième millénaire, imaginer la vie adulte des peuples, sans la tyrannie des pouvoirs ? Sortons de la dépendance !

Un exemple parmi d’autres :
Le pouvoir patronal, allié au pouvoir politique, et les deux alliés aux pouvoirs financiers, nous tiennent de plus en plus à la gorge. Leur moyen ? Le salariat ! Je reste profondément frappé qu’en presque deux siècles, des hommes brillants comme Marx, Jaurès, tant d’autres encore, ne se soient pas plus sérieusement préoccupés d’abattre le salariat. Ils ont voulu combattre le capitalisme et ils avaient raison. Mais au-delà, la nature humaine étant ce qu’elle est, ils pouvaient imaginer qu’aussi longtemps qu’existerait une anomalie comme le salariat, les capitalistes reviendraient à la charge pour transformer les salariés en esclaves, ce à quoi nous assistons de façon totalement tragique désormais.

Tout salarié est « possédé » par son patron et, en France, au travers du « contrat nouvelles embauches », les derniers garde-fous viennent de sauter. La possession sera de plus en plus étouffante, qu’on ne s’illusionne pas. Mais parce que personne n’a réfléchi au remplacement du salariat par une autre forme de moyen de subsistance, les chaînes sont bien enroulées autour de nos poignets. Sans aucun doute, ce problème est des plus complexes ; la solution exigera nombre de renoncements en termes de confort, de sécurité, mais aussi en termes, pour les plus ambitieux, de conquête des pouvoirs, des plus modestes au plus grands en entreprise. Je suis pourtant convaincu qu’il n’existe pas de problème sans solution.
Il n’est pas de liberté conquise sans souffrances.

Qu’on ne s’y méprenne pas : Je ne fais pas l’apologie de la souffrance. Je constate, comme tant d’autres avant moi, que la souffrance fait partie intégrante du parcours nécessaire pour atteindre l’âge adulte. En outre, lorsque je parle de souffrance, je ne parle bien sûr pas des souffrances liées à des maladies, à des décès naturels, ces souffrances écrasantes dont l’homme n’est pas ou peu responsable. Ce que je veux dire, c’est qu’aucun espace de liberté ne s’est jamais conquis sans que ceux qui se battent n’aient, sous une forme ou une autre, à en souffrir. Mais c’est à partir du moment où ils ont accepté cette souffrance et qu’ils sont parvenus à la dépasser, que le progrès essentiel a pu s’accomplir.

Si je reprends l’exemple précédent, il est bien évident que si nous trouvons une solution alternative au salariat, ce ne sera pas sans souffrances, au début du moins. Ce sera une vie avec bien moins de sécurité (encore que parler de sécurité pour le type de salariat actuel, relève du fantasme), ce sera une vie forcément moins confortable, bien plus rude. Mais ce sera le début d’une liberté qui ne demandera plus qu’à grandir. Et c’est toujours la liberté qui fait grandir, pas l’asservissement.

Un tel chemin nous obligera, si nous avons le courage de l’entreprendre, le développement de la conscience collective, donc son corollaire, l’amenuisement progressif de l’individualisme. Mais qu’avons-nous à y perdre ? Rien ! Tout au contraire, nous avons tout à y gagner. La conscience collective est le moyen le plus sûr de retrouver à nouveau le chemin de la solidarité.
Conclusion

La condition du progrès humain nécessite la fin des « pouvoirs » tels que nous les avons connus jusqu’ici. On peut concevoir une sorte de « conseil des sages » pour guider les humains, mais certainement plus pour les gouverner. Les pouvoirs, tous sans exceptions, ont signé leur échec.

Tant que des hommes voudront le pouvoir, qu’ils feront tout pour l’acquérir et le conserver, tant que des peuples seront prêts à le leur confier, ces derniers ne deviendront pas adultes. Etre véritablement adulte, c’est-à-dire devenir un humain accompli, signifie de tout faire pour n’être sous les ordres de personne, et de ne commander personne. L’humain accompli, pour être pleinement humain, est celui qui se met au service de tous, sans le moindre calcul, sans la recherche du moindre bénéfice personnel.

Il y a un chemin qui me semble possible. C’est celui des inventions de pratiques de vie alternatives. Ici ou là, des expériences sont menées. Elles ne concernent, en général qu’un petit nombre d’individus. Mais ce chemin me paraît excellent et essentiel, parce que, peu à peu, ces humains qui pratiquent ces alternatives apprennent à se passer des pouvoirs.

Inutile d’affronter les pouvoirs, rendons-les inutiles par une nouvelle pensée, de nouvelles attitudes personnelles et de nouvelles pratiques de vie. Ils tomberont enfin comme les fruits pourris qu’ils sont, et le souffle de vie, enfin, pourra rejaillir, libéré des chaînes millénaires...

Le pouvoir : Faut-il obéir ou résister ? - 5 -

jeudi 11 août 2005, Jean Dornac



Petit rappel des articles précédents :

- Postulat : Les pouvoirs, presque depuis toujours et presque tous, se comportent comme des pères ou mères abusifs. Ceci dans le dessein de maintenir les peuples dans l’âge d’enfance ou éventuellement en âge d’adolescence, mais dans tous les cas pour conserver, seuls, le pouvoir.
- Si les pouvoirs, dans les pays proclamés « démocratiques » sont légitimes au regard du droit écrit par et pour eux-mêmes, ils ne sont pas légitimes par rapport au « droit moral » non écrit que les peuples ressentent et comprennent fort bien.
- Nous avons vu, au travers de quelques exemples, avec l’article 4, que l’exercice du pouvoir actuel, en France et dans quelques autres pays, n’a, logiquement, rien à voir avec la légitimité morale lue avec le support du « droit moral ».

Qui dit pouvoir moralement illégitime, qui dit encore exercice du pouvoir moralement illégitime, dit aussi son corollaire inévitable : « A pouvoir illégitime, résistance légitime. »
Légitimité de la résistance

Bien entendu, aucun tenant du pouvoir, aucun politicien appartenant à un parti dit « à vocation majoritaire » n’acceptera de reconnaître que notre résistance est légitime. Pas plus qu’il ne pourrait ni ne voudrait reconnaître que son pouvoir, celui qu’il sert et dont il se sert, est illégitime. Il brandira toujours les « tables de la loi », religieuses dans le passé, républicaines aujourd’hui.

Mais, pour un esprit subversif, c’est-à-dire un esprit libre, autrement dit un esprit qui cherche le renversement, même de manière non-violente, de l’ordre social ou politique, l’illégitimité du pouvoir est évidente et ce pouvoir ne peut qu’être combattu pour être remplacé ou, mieux, lorsque les peuples seront mûrs, pour s’en passer enfin et définitivement.
Justification de la légitimité de la résistance face aux pouvoirs illégitimes

1) Même si je me répète, mais qu’importe compte tenu de l’importance de cet élément, la première justification c’est que tout homme est égal en dignité et en importance à tout autre. Pour moi, c’est le fondement même de l’essentiel de ma pensée. Ce fondement est la base de ma révolte, de mon combat altermondialiste. Parce que j’ai la certitude de cette égalité absolue entre chaque humain vivant sur terre, femme comme homme, toutes cultures confondues, toutes religions ou non-religions confondues, tous âges confondus, je n’accepte pas et n’accepterai plus jamais qu’un groupe d’humains, qu’il soit riche ou cultivé plus que la moyenne, se prétende supérieur. C’est une fumisterie et de taille !

Les élites se considérant obligatoirement supérieures aux peuples, se permettront toujours, comme nous l’avons entrevu dans l’article 4, d’abuser le peuple, de le spolier, de créer des lois iniques. Il est d’ailleurs, à cet égard, frappant de constater à quel point les lois n’ont pas le même sens et la même valeur selon qu’on est issu du peuple ou de la prétendue élite. Il suffit de suivre quelques jugements, au tribunal, pour s’apercevoir que nombre de lois sont appliquées avec rigueur, dès qu’il s’agit du monde des pauvres et combien ces mêmes lois épargnent les puissants, pour des faits bien plus graves. Il en va de même pour les impôts et tant d’autres choses rattachées au droit qui se sont transformées en privilèges de caste.

On ne peut plus espérer revenir en arrière sans une véritable révolution. Mais attention, révolution ne veut pas dire forcément violences. On le voit depuis une bonne trentaine d’années, en France, en Angleterre, en Allemagne, aux USA comme ailleurs, les peuples peuvent voter pour n’importe quel parti politique « à vocation majoritaire », rien ne change. C’est toujours la même pression qui est exercée sur le peuple, et rien que sur lui. Nous avons atteint un point de non-retour, tant que ce type de parti politique monopolisera le pouvoir. Pour espérer un vrai changement, il faut obligatoirement donner libre cours à un parti n’appartenant pas à ce courant livré aux puissants du « marché mondial et financier » tout en s’interdisant d’élire un parti qui serait xénophobe, raciste, prétendant que ses membres ou le peuple sont supérieurs aux autres hommes, aux étrangers. Même si ces partis étaient, à la limite, susceptibles d’améliorer les conditions de vie du peuple, ce que je ne crois pas, ils poursuivraient, par d’autres moyens, la même politique de destruction ou d’empêchement de la cohésion humaine au niveau mondial. Et ce serait aussi tragique que nos malheurs actuels.

2) L’autre justification est forte également puisqu’elle est la réponse obligatoire à l’illégitimité du pouvoir. Il faut, parce que nous sommes des humains debout et non pas des esclaves couchés, résister, refuser le fait accompli. Toute démission, dans ces domaines, fait de nous des esclaves. Et nous le voyons très fortement, depuis trois ans en France. Chaque été, le peuple, légitimement, c’est vrai, prend ses vacances, oublie la politique et les politiciens retors. Mais les politiciens, eux, n’oublient pas de satisfaire leurs ambitions au travers de l’augmentation continuelle de leurs privilèges ou des privilèges de ceux qui, seuls, justifient encore leurs actions, c’est-à-dire le monde industriel et financier, les grands patrons pour simplifier. C’est ainsi que, ces trois dernières années, nous avons vu, successivement, en l’absence du peuple qui se reposait, la destruction du système des retraites ; la destruction de la protection sociale ; et cette année, un coup mortel contre le droit du travail au travers du CNE, le « contrat nouvelle embauche ». Par ces destructions, pour lesquelles le pouvoir actuel n’a jamais reçu mandat du peuple, nous voyons à quel point ce pouvoir français est illégitime et ne fait de la politique que pour l’intérêt de ses commanditaires riches et puissants et cela au détriment de plus en plus sévère du peuple.

L’intérêt et la volonté du peuple, proclamé « souverain » par la Constitution du pays, sont le partage des richesses entre tous, le droit de vivre libre pour tous, le droit à la culture pour tous, la santé pour tous, le logement pour tous, autrement dit l’application réelle, effective, des droits de l’homme conçus et voulus par nos ancêtres révolutionnaires. L’intérêt et la volonté du pouvoir, qui n’est pas proclamé « souverain » dans la Constitution, sont l’accaparement des richesses du pays au seul bénéfice de petites castes déjà bien trop riches et puissantes. Et cela se concrétise par la négation de fait des droits de l’homme.

Il est donc non seulement légitime mais encore nécessaire que les peuples, en particulier ses membres les plus conscients quant aux réalités du pouvoir, se lèvent et résistent afin de reprendre, à ceux qui ont rétabli des privilèges dignes des temps féodaux, la souveraineté et de la rendre au peuple, seul détenteur légitime. Le peuple, ici, en France, doit se soulever s’il veut à nouveau vivre dignement, vivre le partage entre tous et prendre le chemin de l’âge adulte qui tarde tant...
Les conditions d’une résistance puissante et efficace

Je n’aurai pas la prétention d’affirmer que je connais toutes les clefs d’une telle résistance. Mais avant d’arriver aux méthodes possibles de résistance, il faut quelques conditions sans lesquelles nous échouerons d’office.

Ce que je vais affirmer semblera être une évidence à beaucoup d’entre vous. Cependant, dans cette époque de banalisation des mots pour désarmer leur puissance, pour les anesthésier, en quelque sorte, j’affirmerai, et avec force, que la première de toutes les conditions d’une résistance efficace et qui ait du sens, c’est la prise de conscience.

Nulle résistance, nulle révolte n’est possible sans la prise de conscience préalable. Il faut en effet prendre conscience que le type de société actuel nous conduit à l’affrontement des civilisations, nous conduit à la mort de l’écosystème, à la mort de toute vie, y compris celle des hommes. Sans cette prise de conscience essentielle, il n’est pas possible de comprendre que le combat entrepris, notamment, mais pas seulement, par les altermondialistes, est le combat pour la survie des générations d’hommes à venir. Ce combat, pris dans ces termes, compris de cette façon, la plus haute, la plus noble, nous devons le mener, nous, humains de ce début du XXIème siècle, parce que nous sommes ceux qui, le plus souvent, avons favorisé la mise en place du système actuel, ou parce que nous l’avons laissé s’installer ou encore parce que, sous une forme ou une autre, nous en avons été complices, même de façon tout à fait inconsciente. Il est, par conséquent, de notre devoir d’entreprendre la renaissance d’une société nettement plus humble dans ses besoins, dans ses objectifs ; nettement plus fraternelle par le partage véritable des ressources naturelles et des richesses produites par tous.

Mais si nous ne prenons pas conscience de la réalité de la situation dramatique du monde, du peu de temps qui nous reste pour sauver ce qui demeure de vie intacte sur cette terre ; si nous refusons de prendre conscience de la gravité de la situation terrestre et de la responsabilité totale des pouvoirs abusifs et illégitimes, alors toute résistance est vaine. A l’heure actuelle, et je ne pense pas trahir leurs pensées, des associations comme Attac, des hommes comme José Bové, et plus modestement des gens comme moi, nous en sommes surtout à la phase du travail nécessaire pour amener au plus grand nombre les éléments nécessaires à la prise de conscience. Non pas que nous serions plus intelligents que d’autres, mais souvent parce que des événements de nos vies ont déclanché, en nous, cette prise de conscience qui se fait rarement toute seule. Il faut bien réaliser que pour beaucoup de ceux qui résistent déjà, et ce fut mon cas, ce qui a déclanché la prise de conscience c’est d’être jeté au chômage. Cette prise de conscience ne s’est pas faite du jour au lendemain, c’est un travail relativement long, il faut déjà remonter la pente après le choc... Malgré tout, pour ceux qui parviennent à sortir de cette « destruction programmée », le chômage devient un terrible révélateur. Du coup, et c’est le revers de la médaille pour les destructeurs de l’emploi, ils fabriquent eux-mêmes l’antidote au poison qu’ils diffusent dans la société. Ils ne pensaient assurément pas qu’au travers du mal profond, d’une souffrance étouffante, qu’ils imposent à leurs millions de victimes, ils allaient parallèlement réveiller notre conscience. Ils font tout, par ailleurs, au travers de la consommation, des médias, de la publicité pour endormir le plus parfaitement nos consciences. Notre chance, c’est la puissance de leur égoïsme et de leur orgueil. Ils n’ont toujours pas compris que plus ils créeront de pauvreté et d’exclusion, plus ils gonfleront les rangs des résistants par le puissant réveil de la conscience qu’ils induisent par leur cruauté.

La deuxième condition, tout aussi importante, c’est de parvenir à abolir, en nous-même la peur. Rien ne peut se faire sous l’emprise de la peur. Il n’y a pas, je crois, de recette précise pour trouver le courage et abandonner la peur. L’un des moyens, cependant, c’est d’arrêter d’accueillir volontairement cette peur, en nous mettant devant l’écran de la télévision, le soir à 20 heures. Ces journaux sont devenus des usines à diffuser la peur, surtout les peurs qui n’ont aucun sens, comme le terrorisme, l’insécurité. Devant les images, les commentaires, si l’on n’a pas d’autres sources sérieuses d’informations, comment éviter de prendre peur ? C’est un poison qui est injecté depuis des années dans les cerveaux des téléspectateurs, en particulier depuis septembre 2001. Et ce poison est mortel pour ceux qui n’en ont pas pris conscience ou qui refusent de comprendre par confort et habitude.

Je suis frappé, ici, à Lyon, de voir certaines personnes avoir visiblement peur, pendant que je me sens, moi, en parfaite sécurité. Parfaite, à un détail près, néanmoins : le déferlement des policiers qui jouent à « Rambo ». Là, je ne me sens pas en sécurité, non pas que j’ai quoi que ce soit à me reprocher, mais parce que des gars qui roulent les mécaniques et qui, de surcroît sont armés, sont par définition potentiellement dangereux. En outre, l’excès de présence policière, et c’est le cas ici, donne un sentiment de pays occupé, d’absence de liberté. Cela va jusqu’au point que, le soir, au Parc de la Tête d’Or, deux voitures de police au moins, avec deux policiers à l’intérieur, après avoir constamment surveillé les gens (on se demande quoi ?), leur rappellent, au moyen d’un mégaphone, que le règlement ordonne qu’il faut quitter le parc avant 22h30, sous peine d’amende, bien sûr !

La troisième condition tombe sous le sens. C’est de ne pas rester seuls. Aucune résistance n’est possible et surtout efficace lorsqu’on est isolé. Internet, à cet égard, est un formidable outil pour prendre des contacts, pour appartenir à un réseau comme pour diffuser les informations. Il ne faut pas hésiter à créer des liens. Peu à peu, même si au début tout cela semble être virtuel, des groupes se forment et l’on rencontre ceux qui sont prêts à résister...

Un grand pas sera fait si nous parvenons à réaliser ces trois points. Désormais, il faut passer aux actes. La grande question sera alors : Résistance violente ou non-violente. Ceux qui me connaissent savent déjà quel est mon choix, celui que je privilégie.

Le pouvoir : Faut-il obéir ou résister ? - 6 -

vendredi 12 août 2005, Jean Dornac



Petit rappel des articles précédents :

- Postulat : Les pouvoirs presque depuis toujours et presque tous, se comportent comme des pères ou mères abusifs. Ceci dans le dessein de maintenir les peuples dans l’âge d’enfance ou éventuellement en âge d’adolescence, mais dans tous les cas pour conserver, seuls, le pouvoir.
- Si les pouvoirs, dans les pays proclamés « démocratiques » sont légitimes au regard du droit écrit par et pour eux-mêmes, ils ne sont pas légitimes par rapport au « droit moral » non écrit que les peuples ressentent et comprennent fort bien.
- Nous avons vu, au travers de quelques exemples, avec l’article 4, que l’exercice du pouvoir actuel, en France et dans quelques autres pays, n’a, logiquement, rien à voir avec la légitimité morale lue avec le support du « droit moral ».
- Dans le cinquième article, nous avons vu que la résistance est légitime puisqu’il s’agit de retrouver notre « souveraineté » perdue.

Résistance légitime : Violente ou non-violente ?

Le postulat à propos de la violence : Selon ma perception personnelle, que nous ne sommes pas très nombreux à partager, c’est vrai, la violence, celle qui tue ou blesse, est un héritage du passé que nous n’avons pas encore dépassé, tant au niveau des pouvoirs qu’au niveau des individus formant les peuples. On peut penser qu’il y a une part de cette violence qui est inscrite au plus profond de nos gènes, qu’elle est liée à l’état instinctif animal des origines humaines. Mais il est évident que la part culturelle qui entretient « l’esprit de violence » pèse très lourdement. Elle n’a jamais vraiment été remise en cause par les autorités, que ce soit au travers de l’enseignement et de la culture (je pense notamment aux films, certaines chansons, certains textes). Les exceptions admirables de résistance non-violente n’ont été présentées, chez nous, que comme une « curiosité exotique » au parfum venu d’ailleurs.

Le postulat général du « pouvoir abusif » et du peuple « maintenu en enfance » pose qu’il est dans l’intérêt des pouvoirs de maintenir bien vivante la culture de la violence :
- d’une part parce que les pouvoirs sont les premiers utilisateurs et bénéficiaires de la violence. On le constate en tout domaines, de la répression policière aux guerres que les pouvoirs parviennent toujours à légitimer par toutes sortes de manipulations et de mensonges.
- d’autre part, parce que pour éduquer tout un peuple à la peur, avec pour dessein de le soumettre à cette peur de manière à mieux le « posséder », il faut le maintenir en contact avec la violence. D’où les intenses campagnes télévisées, notamment aux informations, montrant la violence, la dénonçant en apparence, mais en la magnifiant en réalité comme dans une grande majorité de films programmés. Les pouvoirs proclament que la violence est hors-la-loi et pour l’imposer, utilisent la violence... Paradoxe ? Non, logique... Ils signifient, par cette pratique, que la violence est leur apanage. C’est l’arme du « père abusif » et seulement la sienne.

Sur la violence, le postulat que je pose est le suivant : La violence est toujours une défaite de l’humain. C’est elle qui, principalement, empêche le développement des peuples comme des individus vers « l’âge adulte ». On comprend, si on accepte ce postulat, que le pouvoir agissant comme un parent abusif, use de la violence, qu’elle soit physique ou psychique.

Un point important toutefois : Il ne faut pas confondre révolte et violence. La première est nécessaire pour l’évolution. L’enfant qui, adolescent, ne se révolte pas contre l’autorité du parent abusif et même d’un parent respectueux de l’évolution de son enfant, reste bloqué dans son évolution mentale pour très longtemps et dans certains cas, à jamais. Mais la révolte, sur le plan politique, n’est pas obligatoirement synonyme de violence. Il suffit de se souvenir des révoltes de Gandhi, Martin Luther King, Malcom X vers la fin de sa vie ou Nelson Mandela pour comprendre ce qui semble a priori paradoxal.

Pour bien comprendre ce qu’est la violence, je vous propose de vous reporter sur l’article Publication du Dictionnaire de la non-violence. Il est certain que les pouvoirs ont tout intérêt à maintenir la confusion entre révolte et violence, de même qu’ils ont intérêt à dénigrer la notion de non-violence.

Par ailleurs, il est important, majeur même, de comprendre que la violence est pratiquement toujours la résultante de diverses peurs. Pour les pouvoirs, c’est la peur de perdre la faculté de gouverner, d’imposer leurs lois, et la peur de perdre tous les avantages liés à cette faculté, puissance, richesse, domination... Pour les peuples c’est souvent l’insécurité, qu’elle soit sociale ou autre, qui induit la peur, puis la violence.
Une forme de violence présenté comme un élément de sécurité majeure

Parmi toutes les formes de violences que nous connaissons de la part des pouvoirs, il en est une qui n’apparaît pas immédiatement comme telle et qui, pourtant, en est une. C’est le viol de la vie privée de plus en plus généralisé, légalisé sous le prétexte fallacieux de la sécurité pour tous.

Les gouvernements des pays riches, de tous les pays riches, profitant de l’effet d’aubaine lié aux attentats de septembre 2001, créent et appliquent méthodiquement des lois sécuritaires impliquant une surveillance toujours plus étroite des populations. Pourquoi s’agit-il d’une violence ?
- En premier lieu parce que ces décisions sont prises sans le moindre mandat du peuple, jamais consulté sur ce thème. Au mieux, les pouvoirs s’appuient sur des sondages dont on connaît le peu de valeur, puisque tout dépend de la forme et du type de questions posées.
- En deuxième lieu, parce qu’il s’agit bel et bien d’un viol de la vie privée. Au rythme adopté pour la création de ces lois, plus un geste, y compris le plus anodin, ne passera inaperçu puisque les villes seront truffées de caméras, dont les images, bien entendu, ne seront jamais vues par une instance réellement indépendante des pouvoirs. Au travers de la carte d’identité biométrique à venir, ce viol est tout aussi puissant et constitue une violence d’ordre psychique puisque tout le monde pourra être contrôlé et surveillé à son insu, donc en permanence.
- Enfin, en troisième lieu, cela revient à enfermer un peuple entier dans une prison, certes, à ciel ouvert, mais une prison tout de même. Il n’est donc même plus besoin d’être un délinquant pour se retrouver dans une prison !

Il va de soi que tous les individus qui ne cèdent pas aux phobies sécuritaires instaurées par les pouvoirs ne peuvent que se révolter devant de tels actes ajoutés à tout ce que j’ai déjà décrit et la masse des autres dont je n’ai même pas parlé.
A ce stade, il faut choisir : Violence ou non-violence ?

On peut, pour faire ce choix crucial, se baser sur beaucoup d’éléments de jugement. La première question qui se pose peut se formuler de deux façons différentes qui induisent un choix préalable, au niveau psychologique.
« Résister contre qui, contre quoi ? » ou « Résister pour qui ou en faveur de quoi ? »

A première vue, il ne s’agit que d’une différence de sémantique et pourtant cette petite différence change tout. La notion « contre » implique, tout de suite en nous, un rapport de force ; la deuxième, implique elle, une notion du type « au service de ». La première formule induit presque machinalement la possibilité de la violence alors que la deuxième, de fait, ne l’implique en rien. Mais, les deux formules correspondent bien à la notion de Résistance. En fait, pour être plus clair, « Résister contre », fait appel à l’instinct et correspond par conséquent au niveau du postulat à un âge d’enfant ou d’adolescent alors que « Résister pour » est une attitude d’adulte.

Il est vrai que certaines situations ne permettent pas ce genre de distinction. Je pense notamment à la Résistance contre les nazis. Les Résistants avaient-ils le choix alors qu’ils combattaient des gens soumis à une idéologie particulièrement barbare ? Cette dernière remarque constitue la limite probable de la résistance ferme et non-violente. A cet égard, il est intéressant de lire ce qu’en pensait Gandhi :
« Là où il n’y a le choix qu’entre lâcheté et violence, je conseillerai la violence... Je risquerai mille fois la violence plutôt que l’émasculation de toute une race ».

Toute la question pour nous, face aux pouvoirs qui nous imposent la mondialisation, est de savoir si nous avons à faire à un pouvoir semblable à celui que Gandhi combattait, c’est-à-dire un pouvoir colonial sauvage, mais encore humain, ou un pouvoir de type nazi qui n’a plus le moindre sens de l’humain. Il est trop tôt, à l’heure actuelle, pour avoir une certitude. Pour ma part, lorsque j’analyse les faits au niveau mondial et même au niveau français face aux méthodes et aux dérives d’un Nicolas Sarkozy avec ses « rafles d’étrangers », je crains que nous nous rapprochions d’un pouvoir de type nazi, du moins dans l’esprit de l’exercice du pouvoir, sans considération ni notion de la beauté et de la grandeur de tout être humain.

Faire le choix de la violence revient donc, si l’on excepte le cas du face à face avec des brutes primaires, c’est faire le choix, au mieux, de rester à l’âge de l’adolescence. Ce choix implique la mort d’hommes, coupables comme innocents. Mais que veut dire coupable à partir du moment où nous nous rendons compte qu’au travers d’un jeu d’héritages culturels malheureux nous sommes tous soumis à la pression quasi perpétuelle du pouvoir similaire à celui des parents abusifs ?

Ce choix de la violence signifie, toujours, un recul de l’humain et au mieux, une stagnation ; il signifie aussi le développement de la haine, une haine qui affectera les rapports humains tout au long d’une génération, voire de plusieurs générations. Ce qui signifie que notre violence d’aujourd’hui, même au nom d’une cause qui semble juste, s’étendra aux innocents des générations suivantes. Ce choix signifie, consciemment ou non, que nous voulons rester dans le rapport de force au lieu du rapport de l’esprit. C’est le rapport du dominant sur le dominé, du père abusif sur l’enfant abusé, du pouvoir abusif sur le peuple opprimé. Ce choix implique donc non pas une avancée commune, mais un recul général.

Je pourrais donner l’exemple des guerres et des révolutions passées. Mais je préfère donner l’exemple de la guerre d’Irak actuelle qui est symptomatique de ce que je cherche à démontrer : la guerre s’est faite au nom de la liberté à conquérir et de la démocratie à installer dans ce pays et les contrées avoisinantes. Or, nous constatons, dans la réalité, le massacre des innocents que sont les civils, les destructions massives, une impossible avancée de la démocratie, l’installation de la haine entre communautés, l’appauvrissement général, la dépendance totale au « pouvoir abusif » américain qui est le seul à tirer un bénéfice de ce crime, celui du pétrole volé au peuple irakien. C’est un échec complet sur tous les plans humains et politiques, un drame pour les familles, l’assassinat de tout l’esprit d’un peuple. Il faudra des dizaines d’années pour reconstruire ce qui aura été détruit en quelques semaines. C’est ça, le fruit de la violence...

Et si je fais un court résumé de quelques révolutions violentes, très sanglantes, cela donne :
- La révolution française qui aboutit à l’empire napoléonien.
- La révolution russe qui aboutit à 70 ans de dictature.
- La révolution iranienne qui aboutit, déjà, à un quart de siècle de dictature.

A contrario, l’une des rares révolutions non-violentes, la révolution des œillets au Portugal, elle, n’a abouti sur aucune dictature... N’est-ce pas là, la signature même de ce que produisent la violence ou la non-violence ?

Il me semble donc tout à fait pertinent de dire que si nous faisons le choix de la révolte, donc de la résistance et si notre volonté est réellement le mieux-être des populations, nous devons nous écarter du choix de la violence. Mais j’insiste sur ce point : la non-violence n’est pas le pacifisme, n’est pas une attitude de lâcheté, n’est pas un abandon ou une trahison. La non-violence, bien comprise, bien appliquée, dans la lignée de ce que fit Gandhi, est la recherche d’une provocation constante des pouvoirs, un harcèlement qui va toujours plus loin, qui est toujours plus exaspérant pour les pouvoirs. Cette non-violence désarme le pouvoir qui ne comprend que le langage de la force et qui l’amène à faire usage de la force, l’obligeant à montrer sa véritable nature même lorsqu’il voulait la cacher.

La non-violence implique aussi l’acceptation du sacrifice personnel et du compagnonnage avec la souffrance. A cet égard, voici ce que disait encore Gandhi :
« L’efficacité de la non-violence est la conséquence, selon Gandhi, d’un acte de foi qui suppose : une conviction spiritualiste (la supériorité de l’esprit sur la force physique) ; une éthique de la souffrance (“Nul ne s’est élevé sans avoir passé par la souffrance...Le progrès ne consiste qu’à purifier la souffrance en évitant de faire souffrir”) ; un fondement religieux universel (“La religion de la non-violence n’est pas seulement pour les saints, elle est pour le commun des hommes. C’est la loi de notre espèce comme la loi de la violence est la loi de la brute”). »

La non-violence comporte, c’est vrai, une dimension spirituelle. Mais il faut cesser d’avoir peur de cette dimension particulière. Nombre de contemporains en ont peur parce qu’elle aussi répond au schéma du postulat. Tant que les religions servent l’idée du pouvoir, de la richesse et des dogmes infaillibles, celles-ci se servent de la spiritualité au lieu de la servir. Ces religions, par ces actes, tuent la spiritualité, du moins elles lui enlèvent tout sens. Il ne peut y avoir de foi, de spiritualité en Dieu, quel que soit son nom, sous le signe de la richesse qui signifie pouvoir, domination, sectarisme, donc violence. L’essentiel des religions, des Institutions religieuses, de ce point de vue, ne sont pas non plus adultes ; elles fonctionnent toujours sur le schéma du père abusif face à des enfants abusés. Mais ce faisant, elles se vident de toute substance et de tout sens. Pire, ce sont elles, par ces méfaits, qui sont responsables de la mort de Dieu dans l’esprit de tant d’humains. Ce faisant aussi, certains membres de ces religions deviennent des assassins : C’est parce qu’il mettait en danger le pouvoir de certains religieux fanatiques hindous que Gandhi a été assassiné...

Le pouvoir : Faut-il obéir ou résister ? - 7 -

samedi 13 août 2005, Jean Dornac



Petit rappel des articles précédents :

- Postulat : Les pouvoirs presque depuis toujours et presque tous, se comportent comme des pères ou mères abusifs. Ceci dans le dessein de maintenir les peuples dans l’âge d’enfance ou éventuellement en âge d’adolescence, mais dans tous les cas pour conserver, seuls, le pouvoir. (article 1). Si les pouvoirs, dans les pays proclamés « démocratiques » sont légitimes au regard du droit écrit par et pour eux-mêmes, ils ne sont pas légitimes par rapport au « droit moral » non écrit que les peuples ressentent et comprennent fort bien. (article 2 & 3). Nous avons vu, au travers de quelques exemples, que l’exercice du pouvoir actuel, en France et dans quelques autres pays n’a rien à voir avec la légitimité morale lue avec le support du « droit moral ». (article 4) Ensuite, nous avons vu que la résistance est légitime puisqu’il s’agit de retrouver notre « souveraineté » perdue. (article 5). Puisque la résistance est légitime, il faut choisir entre la résistance non-violente et la violence. Seule la solution non-violente, hormis les cas où l’adversaire est une brute achevée, peut permettre aux peuples de gagner, peu à peu, leur indépendance par rapport au pouvoir, donc tendre vers l’âge adulte. (article 6).

Les cheminements de l’indépendance des peuples.

Nous l’avons vu, et ce n’est qu’un peu de réalisme qui me le fait affirmer, l’indépendance d’un jeune soumis à des parents abusifs est toujours source de souffrances ; les difficultés pour couper ce cordon ombilical virtuel, mais plus puissant qu’une chaîne d’acier trempé, sont immenses et pas toujours couronnées de succès. Ce jeune, s’il ne trouve pas les ressources pour briser cette chaîne, d’autant plus étouffante que le plus souvent elle n’est pas palpable, ne vivra jamais pleinement. Il sera incapable de mener une vie réellement et pleinement responsable.

Il en va de même pour les peuples, partout sur cette terre. Je cite le plus souvent la France, mais il est évident que, les humains étant égaux, étant « construits » sur le même modèle, le postulat du pouvoir abusif sur le modèle du père abusif se retrouve sous toutes les latitudes, à quelques détails près.

Toutes ces populations immenses, partout, régulièrement, ont dû et doivent encore se soulever pour tenter de se libérer du « père pouvoir abusif ». C’est ainsi, que tout au long de l’histoire humaine, partout, des peuples se sont soulevés contre les pouvoirs qui les oppressaient. Et comme s’il n’était pas suffisant que leur propre pouvoir les oppresse, de nombreux peuples ont dû se battre contre des colonisateurs.
Le principe des colonies

La colonisation n’entre pas totalement dans le schéma du postulat. Elle en fait partie, et de façon extrêmement dure, quant aux méthodes d’autoritarisme et d’oppression contre les populations asservies, mais pas sur la motivation. Du moins est-ce plus complexe.

L’orgueil est ainsi fait qu’il s’associe très souvent avec la rapine de bas étage. Mais, parce qu’il s’agit de l’orgueil, la rapine en question se mue en volonté civilisatrice. Je ne prétends pas non plus détenir la vérité en ce domaine, mais tout de même... Regardons, succinctement ce qu’il en est.

Aux origines, ainsi que dans quelques autres cas, comme actuellement la colonisation féroce et destructrice en Palestine par les Israéliens, il y avait un besoin réel ou affiché, d’agrandissement du territoire. Mais, sous ces motivations déjà discutables, il y a toujours une volonté évidente de s’accaparer également les ressources naturelles et les quelques richesses

Hors ligne

#3  03-10-2005 18:00:26

Aragorn
 

Re: LePouvoir:Faut-IlObéirOuRésister?Suite2

Hors ligne

Pied de page des forums


Accueil | Tablatures | Compos | Blog | Forum | Annuaire | Contact