Bon appetit bien sur !!!
LES OEUFS DE BATTERIE
La soif de rentabilité e3 court terme semble sans limite. Et l'élevage des poules en batterie, avec le renfort de la chimie, n'échappe pas à la règle. Accrochez-vous...
haque fois que nous achetons une boîte d'ufs qui ne porte aucune mention sur le mode d'élevage, nous pouvons être cer tains que ces poules ont été élevées en batterie. C'est-à-dire qu'elles sont quatre dans une cage de 40 cm de côté, constamment éclairées par de la lumière artificielle, et leur espérance de vie ne dépasse pas un an. Elles mettent six semaines au lieu de six mois à atteindre leur poids « normal ». L'observation de leurs troubles de comportement indique un rejet de ces traitements contre nature qui engendrent de leur part une forte agressivité. C'est pour cette raison qu'on leur administre
des calmants et qu'on les ampute de leurs becs et de leurs griffes. Ces traitements impliquent une forte mortalité. Pour éviter les maladies, on les gave d'antibiotiques et de médicaments que l'on retrouvera dans l'uf, donc obligatoirement dans notre assiette. Mais l'important est que ces poules pondent environ douze fois plus que les poules élevées en liberté. Après l'abattage, leur carcasse sert à confectionner des bouillons et des raviolis.
En France, 50 millions de poules pondeuses sont ainsi condamnées à perpétuité. Quant aux poussins mâles, nonproductifs, ils sont gazés ou broyés
vivants afin d'être transformés en farine animale.
Jacqueline Bousquet, docteur essciences et chercheur honoraire au CNRS, s'indigne :
« Comment considérer les ufs issus de ces malheureux volatiles ? Certains les nomment ufs de la souffrance, ufs de la honte. Si les consommateurs pouvaient voir sur les présentoirs la photo de ces poules dont la détresse physiologique est incommensurable, ils se détourneraient avec dégoût d'un tel produit porteur de mort. Ces ufs manifestent du reste une inversion de polarité très inquiétante. Nous devons aujourd'hui manger moins,mais manger mieux. Ce changement de comportement nous est imposé par la Nature que nous pensions pouvoir asservir et bafouer en toute impunité. Qu'attendent les scientifiques pour démontrer qu'il n'y a pas de salmonelle dans les ufs provenant de poules élevées normalement, c'est-à-dire disposant d'une nourriture naturelle, d'un espace vital correct, pouvant gratter le sol et se percher comme l'a décidé Mère Nature qui l'a programmé dans leurs gênes ? ».
Dans un ouvrage corrosif, « Les Poules préfèrent les cages e, paru aux Editions Albin Michel, Armand Farrachi signale avec beaucoup d'humour qu'un groupe de « scientifiques », qui a étudié pendant « de longues années » plusieurs groupes de poules, a constaté que les volailles élevées en batterie n'étaient pas gênées par leur cage, mais qu'au contraire elles s'y trouvaient plus en sécurité qu'ailleurs. « La comparaison impose l'évidence : les poules préfèrent les cages », conclut Armand Farrachi. « ll n y aura bientôt plus lieu de s'étonner qu'à l'aube du XXIe siècle, dans une société 'avancée, de haut niveau culturel, scientifique et technique,on se propose de prouver et d'imprimer en toutes lettres, noir sur blanc, dans des publications officielles destinées à informer ou à convaincre, qu'un être vivant à qui la nature a donné des membres pour courir, des ailes pour voler, un bec pour picorer, lorsqu'il a le cheik entre la liberté et la détention, préfère être incarcéré e.
Et Armand Farrachi cite le professeur Jean-Michel Faure, de l'Institut national de la recherche agronomique, qui a mené avec beaucoup de sérieux une longue étude sur les « Besoins en espace de la poule pondeuse » et en a déduit avec beaucoup de conviction qu'une plus grande surface ne correspond pas à un besoin pour les poules. II va sans dire que les revues professionnelles agricoles ont repris avec délectation les propos de ce « savant » et, fortes de ses affirmations, ont dénoncé « l'outrance e des protecteurs des animaux. Certains chercheurs de l'Inra demandent la sélection d'animaux moins peureux, plus résistants aux contraintes de l'élevage. Ils devraient demander au plus vite à leurs confrères généticiens de mettre à jour le gène de l'adap`aU!I~té afin de permettre à cespoules d'être plus heureuses dans leurs prisons. S~ la (( culture scientifique » mène à ce genre u~ J _~_~rs, vive « l'ignorance e!
Les poules ne sont pas les seules victimes de ce système de surproduction. Tous les animaux comestibles subissent un sort identique.
Dans cette compétition sans limites, il est indispensable d'élever un veau en moins de trois mois et celui-ci doit alors atteindre cent cinquante kilos. Pour réussir ce tour de force, il suffit d'écouter les conseils des spécialistes en suralimentant les animaux que l'on retire à leur mère dès la naissance. Pour que leur viande reste blanche et tendre, on les emprisonne dans des boxes de 1,2 m sur 0,65 m dans lesquels ils ne peuvent bouger, sans paille, nourris avec le seul lait fourni par la coopérative. On les prive de lumière, et, en toute légalité, on leur administre force antibiotiques pour combattre la prolifération de maladies infectieuses, ce qui permet aux souches bactériennes de devenir résistantes aux antibiotiques.
Par ailleurs, dans cet univers concentrationnaire, il est fréquent que ces animaux développent un comportement agressif, voire hystérique, car ils sont soumis à des stress et à des décharges hormonales qui minent leur système immunitaire. Pour pallier cet état de moindre résistance, on leur administre des médicaments antistress, des substances para-hormonales, des vaccins, ainsi que des stimulants cardio-respiratoires à titre préventif, sans oublier, sur cette liste inquiétante, les vitamines et autres substances chimiques indispensables à leur survie. II est évident que ce cocktail abominable se retrouve dans l'assiette du consommateur.
Il en est de même pour les porcs. Autrefois, on estimait qu'un hectare était nécessaire pour engraisser 40 porcs. A présent, ils sont 5 000 entassés sur la même surface, au milieu de leurs déjections, et doivent atteindre le poids de 110 kilos en six mois. Quant aux truies, eÎles sont maintenues au sol par des sangles tout au long de la gestation et de l'allaitement. Mais, à l'instar des « poules qui préfèrent les cages e, d'après un ingénieur agronome : « Les truies à l'attache, gestantes ou allaitantes, ne manifestent aucun mal-être, ont l'air tout à fait heureuses et même, , oserais-je dire par ironie anthropomorphique, souriantes » (cité par Karine Lou Matignon dans « L'Impasse alimentaire », Editions Fayard). On ne pourrait inventer de pareilles inepties. Cependant, soyons rassurés, le conseil des ministres européen de l'Agriculture a décidé d'interdire ces stalles à truies à partir de 2012 pour l'ensemble des élevages de l'Union européenne. Qui prétend que nous sommes inhumains dans nos comportements ? En attendant, ces truies devront continuer à subir leur martyre, mais ne sont-elles pas des « marchandises » ? Une marchandise ne peut avoir d'état d'âme !
D'après un sondage de la Sofres daté de février 1999, 83 % ~,es Français estiment que l'élevage en batterie est cruel et 78 % _~ouhaltent qu'il soit interdit. Pourtant, malgré cette opinion, les consommateurs persistent à consommer les produits immondes qu'on leur propose au lieu de les saboter, aussi oeu importe leur avis. De toute manière, l'économie mondiale est an pleine expansion et cela est le plus important.
L'épistémologiste Pierre Thuillier déclarait dans la revue Terre du ciel n° 34 (1996) : « Une science qui se réduit à une technique, une manipulation artificielle du vivant, une science qui a vidé le monde de son flux vital et de son âme et qui s'affirme comme refus, voire comme haine de la Nature, fait partie de la oathologie de nos experts et ingénieurs du XXe siècle finissant »,
cette étude a été éffectuée par Sylvie Simon et elle paraît dans le mensuel gratuit "Biocontact" de mars 2005 (num 145).